Le bonheur au travail
de Martin Meissonnier
par Pauline Kraus
En lisant ce koob, vous découvrirez que vous pouvez être heureux au travail en adoptant une bonne stratégie de management.
Vous découvrirez aussi :
- d’où vient la hiérarchie pyramidale qui prévaut dans les entreprises ;
- que plus vous respectez intellectuellement vos employés, plus ceux-ci sont heureux ;
- les dangers des Bullshit jobs ;
- que le lean management est hérité de la philosophie japonaise du kaizen ;
- que le bonheur des employés joue sur la productivité de l’entreprise.
Le bonheur est recherché par tout le monde et fait partie des caractéristiques de ce qu’est une vie pleinement vécue. Cependant, les chiffres montrent que le bien-être ne s’étend pas dans la sphère professionnelle. En effet, en France, seuls 11% des salariés sont “engagés”, c’est-à-dire qu’ils sont heureux de faire leur métier et qu’ils se lèvent le matin avec l’envie de travailler. À l’inverse, 61% sont désengagés et se rendent au travail sans intérêt particulier, simplement pour gagner un salaire. Enfin, 31% sont activement désengagés et viennent au travail à reculons, sans souhaiter construire une relation durable et intéressante avec leur entreprise. Pourtant, le travail, exercé dans de bonnes conditions, peut être une source de bonheur et d’épanouissement sans pareille. Comment être heureux au travail ?
L’avis de l’auteure du koob, Pauline Kraus :
J’ai trouvé ce documentaire très intéressant et rempli de bonnes idées. Je me suis totalement reconnue dedans : en tant que jeune travailleuse, les entreprises au fonctionnement traditionnel et avec une hiérarchie pyramidale ne retiennent absolument pas mon attention. Elles appartiennent selon moi au passé. Ce documentaire met bien en avant les avantages de la transition vers la libération de l’entreprise tout en montrant les dérives du lean management. Cela arrive lorsque les multinationales ne font que recréer une hiérarchie avec un leader au sommet, tout en se donnant l’apparence d’une entreprise libérée. Je vous conseille donc de regarder ce documentaire si vous voulez trouver des idées pour manager différemment vos collaborateurs et remettre leur bonheur au centre de vos préoccupations !
L’organisation actuelle du travail trouve sa source dans l’organisation de la société
Les entreprises fonctionnent généralement selon une hiérarchie pyramidale qui trouve son origine dans la société. Cependant, cette dernière ayant évolué, l’organisation traditionnelle du travail n’est plus du tout adaptée à la réalité d’aujourd’hui. Pourquoi ?
D’abord un animal solitaire, l’homme s’est progressivement organisé en structure sociale sous la forme de tribus. Afin de maintenir l’ordre et la cohésion du groupe, des chefs ont été élus.
À l’origine, le chef devait être au service du peuple, mais cette idée a depuis bien longtemps été dévoyée par les sociétés modernes.
En effet, lorsque les grandes organisations industrielles sont apparues, elles ont transformé ce leadership en une pyramide hiérarchique. À son sommet, il y a une série de chefs qui :
- protègent leurs propres intérêts ;
- donnent des ordres aux personnes situées à la base de la pyramide.
L’idée derrière cette pyramide est donc de faire en sorte que les pions qui composent l’échiquier de l'entreprise soient contrôlés par des chefs situés dans la hiérarchie.
Par exemple, en Grande-Bretagne, pendant la révolution industrielle du XVIIIe siècle, la demande en main-d’œuvre était très forte. Les entreprises ont donc recruté beaucoup de paysans analphabètes pour effectuer des tâches simples et répétitives.
Toutefois, comme ils avaient du mal à arriver à l’heure, les entreprises ont mis en place des pointeuses. De même, les paysans buvaient beaucoup de whisky pour se redonner des forces. Les entreprises ont donc embauché des contremaîtres chargés de veiller à l’activité des pions.
Aujourd’hui, les choses n’ont pas évolué. Par exemple, dans de nombreuses usines européennes, des opérateurs qui ont des dizaines d’années d’ancienneté doivent toujours demander à leur contremaître à aller aux toilettes.
Les employés à la base de cette pyramide se retrouvent quant à eux :
- coincés dans un système qui les dépasse ;
- privés de leur dignité et de leur singularité ;
- privés de leur capacité de réflexion.
Dès lors, ils étouffent et se transforment en bons petits soldats obéissants.
Pourtant, cette manière de fonctionner n’est plus du tout adaptée à la situation actuelle. En effet, vous évoluez maintenant dans l’ère numérique : les consommateurs sont partout, ce qui oblige les entreprises à innover en permanence.
Or dans l’organisation pyramidale qui prime encore aujourd’hui, la place pour le changement est très réduite puisque tout le système est verrouillé de l’intérieur.
Ainsi, les employés :
- ne sont pas invités à penser par eux-mêmes ;
- ne sont pas écoutés lorsqu’ils proposent des idées novatrices.
En outre, les chefs leur demandent de toujours gagner en performance et en productivité, alors même qu’ils évoluent dans une structure qui s’oppose au changement.
La situation est sans appel : si les entreprises ne changent pas profondément leur organisation, elles ne survivront pas aux changements de l’ère numérique.
En somme, l’organisation pyramidale des entreprises est héritée d’un modèle sociétal qui n’a plus cours avec l’ère numérique qui pousse à l’innovation. Les entreprises ont donc tout intérêt à revoir leur copie si elles veulent s’adapter au monde d’aujourd’hui.
Les Bullshit jobs ont contribué à la perte de sens du travail
Le développement de la hiérarchie pyramidale a vu naître toute une série de postes qui ne servent littéralement à rien. Comment ont-ils fait perdre le sens du travail à certains employés ?
Inventé par l’anthropologue américain David Graeber, le principe du Bullshit job consiste en un chef qui est employé pour surveiller un chef qui surveille lui-même un chef. Dans ce cas, aucun des trois employés ne fait réellement un travail utile. ****Cette hiérarchie sans but crée un profond mal-être chez les employés.
Les Bullshit jobs ont commencé à pulluler autour des Trente Glorieuses, entre les années 1950 et les années 1980. La consommation de masse était alors à son apogée, faisant gagner énormément d’argent aux entreprises.
Par conséquent, elles embauchaient à tour de bras des individus qui n’avaient rien à faire dans l’entreprise. Comme il fallait bien les mettre quelque part, ils devenaient sous-chefs pour les sous-chefs.
Pire, ces sous-chefs sont mieux payés que les employés nécessaires pour faire avancer l’entreprise. De fait, la plupart des personnes qui font un travail indispensable à la société sont mal payées.
Par exemple, sans les infirmières ou les éboueurs, la société s’effondrerait totalement. En revanche, rien ne changerait sans consultants en ressources humaines ou sans avocats d’affaires, qui gagnent pourtant des sommes astronomiques au regard de ce que gagne un infirmier.
Finalement, moins vous êtes utile, plus vous gagnez de l’argent.
De même, lorsque les entreprises doivent faire des réductions de postes, elles choisissent généralement les employés à des postes utiles, car les chefs se protègent entre eux. Bien évidemment, l’entreprise qui choisit cette solution ne se remet que rarement si elle subit un revers financier.
Pour résumer, les Bullshit jobs sont inutiles et font perdre du sens au travail de leurs employés. Pourtant, ce sont des emplois protégés et bien mieux payés que des emplois indispensables au fonctionnement des sociétés.
Les entreprises libérées du modèle pyramidal sont plus productives et leurs employés sont plus investis
Les entreprises qui se sont libérées d’une hiérarchie pyramidale affichent de très bons résultats, tant économiques qu’en termes de bonheur des employés. Pour quelle raison ?
Le terme “entreprise libérée” a été inventé par les professeurs de management Brian Carney et Isaac Getz, qui ont étudié plus de 200 entreprises dans le monde.
Il s’agit d’une société dans laquelle la majorité des salariés entreprennent toute action qu’ils pensent être la meilleure pour l’entreprise. Ils en ont la liberté et la responsabilité.
D’ailleurs, les entreprises qui ont fait la transition entre l’organisation en hiérarchie pyramidale et la libération s’en sortent mieux que les autres.
Par exemple, l’entreprise Poult, fondée en 1823 et située à Montauban, est un acteur majeur sur le marché du biscuit.
Avant, l’entreprise avait une structure traditionnelle avec :
- un directeur d’usine ;
- un chef du personnel
- des contremaîtres ;
- des chefs de ligne.
Les opérateurs, au bas de la pyramide, exécutaient les ordres sous la houlette des chefs de ligne.
En 2001, Poult a traversé une mauvaise passe. L’entrepreneur belge Carlos Verkaeren est donc arrivé pour remettre l’entreprise sur pied.
En 2006, il a rassemblé tout le personnel de l’usine pour réfléchir à un moyen d’améliorer la situation. Tous les employés, quelle que soit leur position hiérarchique, ont été invités à proposer de nouvelles idées pour améliorer leur travail.
Après cette consultation :
- la hiérarchie intermédiaire (chefs de lignes, contremaîtres, chefs du personnel) a été supprimée ;
- les anciens cadres se sont vu attribuer de nouvelles fonctions d’accompagnement des opérateurs ;
- les décisions étaient prises en petits groupes représentatifs de l’ensemble de l’entreprise avec des ouvriers, des employés et des cadres.
Grâce à cela, l’entreprise s’est renforcée, car :
- les employés n’étaient plus en conflit avec la direction ;
- les employés ont acquis une conscience professionnelle différente, car ils étaient plus investis ;
- l’entreprise a beaucoup embauché ;
- elle a marqué une croissance de 12%.
Finalement, les entreprises libérées ont permis à leurs employés d’être plus investis dans les décisions associées à leur travail. Avec ces nouvelles méthodes de fonctionnement, les conflits diminuent et la croissance de la société est très positive !
Les entreprises libérées mettent le bien-être des employés au centre de leur fonctionnement
Si un employé se sent bien dans son entreprise, il n’a aucune raison de la quitter. Au contraire, il souhaite s’investir davantage. Comment donner à vos employés la place qu’ils méritent dans votre entreprise ?
Pour améliorer grandement le bien-être de vos employés, vous devez développer quatre manières de penser et d’agir.
Intégrez vos employés dans les processus de décision
Vos employés étant sur le terrain, ils ont bien souvent de meilleures idées que vous concernant les changements à apporter pour maximiser les résultats. Vous devez donc les faire participer aux prises de décisions de votre société.
Par exemple, après une période de prospérité de 10 ans, la société nantaise Chronoflex, spécialisée dans la réparation de flexibles, a souffert de la crise de 2008. En 2012, le PDG de l’entreprise a réuni ses salariés en les invitant à partager leurs idées pour sortir de la crise.
Les employés ont pris de si bonnes décisions qu’aujourd’hui, l’entreprise se porte mieux que jamais !
Faites bénéficier vos employés des profits de l’entreprise
Vos employés seront d’autant plus reconnaissants s’ils peuvent bénéficier des profits économiques de l’entreprise.
Par exemple, Chronoflex a créé des comptes d’exploitation individuels pour ses salariés. Au-delà du seuil de rentabilité de chacun, ils obtiennent une marge nette de 15%.
En plus de ce bonus, les techniciens en reçoivent un deuxième de 15% lié à la réussite de leur équipe. Enfin, les employés administratifs reçoivent tous les six mois 15% de la marge répartie à parts égales à tous les salariés de l’entreprise.
Si cela paraît être une grosse somme d’argent dépensée en bonus, le résultat a été probant. En effet, le chiffre d’affaires de l’entreprise a augmenté de 15%, car les employés étaient plus engagés dans leur travail.
Créez des cellules de travail à taille humaine
Créer des cellules à taille humaine permet aux employés de s’exprimer librement et de proposer de nouvelles idées.
C’est ce que pense par exemple Jean-François Zobrist, qui a réduit l’organisation de l’entreprise Favi, spécialisée dans la production de boîtes de vitesse, à :
- un directeur ;
- des employés qui s’organisent.
Cela fonctionne puisque, les bonnes années, Favi a pu offrir trois mois de salaire en bonus à ses employés !
Améliorez les locaux de vos employés et laissez-les choisir où et quand ils travaillent
Vous devez améliorer l’environnement de travail direct de vos employés ****en faisant attention :
- à la sécurité ;
- au respect des règles d’hygiène et de santé ;
- à prévoir des espaces dédiés pour tenir des réunions dans de bonnes conditions, etc.
Ensuite, donnez à vos employés la possibilité de s’organiser comme ils l’entendent.
Par exemple, Frank van Massenhove est un haut fonctionnaire belge qui est arrivé à la tête du ministère de la Sécurité sociale en 2002 pour le remettre sur pied.
De fait, personne ne voulait y travailler et surtout pas les jeunes de la génération Y, nés après 1983, qui ne voulaient pas qu’un patron leur dise où et quand travailler.
Massenhove a donc mis en place la possibilité de télétravailler jusqu’à trois jours par semaine et a permis aux employés d’organiser leur temps de travail différemment.
Les résultats du ministère se sont grandement améliorés :
- les employés sont désormais heureux d’y travailler ;
- les délais de traitement des dossiers sont passés de 18 mois à 4,5 mois.
En bref, la recette du bonheur au travail est d’intégrer vos employés aux processus de décision et de recréer des cellules à taille humaine pour leur permettre de s’exprimer. De plus, leur bien-être passe par de bonnes conditions de travail et d’un bonus issu des profits de l’entreprise !
Vous serez plus heureux en travaillant en fonction de vos intérêts
Lorsque vos missions vous intéressent, vous travaillez mieux et vous avez envie de vous lever le matin pour trouver des solutions toujours plus innovantes. Comment intégrer ce principe dans votre quotidien professionnel ?
Dans les années 1950, Bill Gore, chimiste de formation, voulait proposer à ses supérieurs une nouvelle utilisation du téflon. L’entreprise, qui était très traditionnelle, a refusé.
Il a donc créé sa propre entreprise en 1958. ****Très rapidement, son fils a inventé une matière textile qui allait habiller tous les pompiers et les randonneurs du monde entier : le goretex.
Bill Gore a alors compris que les entreprises multinationales avaient tout intérêt à laisser leurs employés innover.
Il a également développé une nouvelle philosophie d’entreprise : “gagner de l’argent en s’amusant”.
Les collaborateurs étaient ainsi encouragés à travailler en fonction de leurs intérêts et de leurs projets personnels. Pour trouver leur place idéale dans l’entreprise, ils étaient accompagnés par le sweet spot.
Il s’agit du point de rencontre entre :
- les compétences d’un associé ;
- ses champs d’intérêt ;
- les besoins de l’entreprise.
En travaillant dans leur sweet spot, les collaborateurs donnent leur maximum sans avoir l’impression de travailler.
Grâce à cela, les produits Gore se sont développés pour intégrer des secteurs aussi divers que :
- les revêtements ;
- l’aérospatiale ;
- la mécanique ;
- l’armement ;
- la médecine ;
- la musique.
Qui plus est, chaque associé était parrainé par un sponsor qui l’aidait à réaliser son projet au sein de l’entreprise.
Par exemple, si un collaborateur avait une idée, il pouvait aller voir son sponsor pour en discuter. Ce dernier mettait également son réseau à sa disposition pour que son projet voie le jour.
Aujourd’hui, l’entreprise de Bill Gore compte 10 000 collaborateurs répartis dans le monde et un chiffre d’affaires de plus de trois milliards d’euros.
Ainsi, encouragez vos collaborateurs à travailler en fonction de leurs intérêts et de leurs projets personnels. Cela peut demander de trouver le domaine de l’entreprise qui conviendra le mieux à chaque employé. Celui-ci n’aura alors pas l’impression de travailler et sera bien plus productif !
La libération des entreprises a ruiné le travail des syndicats pour protéger les droits des employés
Si tout semble se passer merveilleusement bien dans les entreprises libérées, des voix s’élèvent régulièrement contre elles. Cette nouvelle organisation n’aurait pour seul effet que de casser les mouvements sociaux et la lutte des classes. Que se cache-t-il vraiment derrière la libération des entreprises ?
En Belgique, le ministère des Transports prépare sa transition vers un système de management libéré. Laurent Ledoux, ancien cadre dans le secteur bancaire, s’est porté volontaire pour mettre en œuvre cette libération selon trois axes.
Remplacer le pointage et les horaires par des objectifs.
Le temps de travail ne se mesure plus au temps passé au bureau, mais aux objectifs fixés par l’équipe. Ainsi, une confiance infaillible s’installe entre employés et employeurs.
Toutefois, un tel fonctionnement a des limites :
- il pousse à faire beaucoup d’heures supplémentaires non payées afin de réaliser un objectif qui peut prendre plus de temps que prévu ;
- il crée une difficulté à déconnecter de son travail. De fait, puisqu’il n’y a plus d’horaires, il faut consacrer le temps et l’énergie nécessaires pour atteindre ses objectifs.
Stimuler le travail de groupe
Travailler en groupe est une bonne idée, mais Laurent Ledoux instaure ce système pour éliminer les maillons faibles des équipes. Selon lui, il existe, parmi les employés, de mauvais éléments qui attendent que le temps passe.
Il veut donc créer des groupes dans lesquels chacun aurait son rôle à jouer tout en espérant que les mauvais éléments soient éliminés de manière naturelle. Par ailleurs, cette technique est destinée à casser la solidarité entre les employés permettant que les patrons puissent diviser pour mieux régner.
Remodeler l’espace de travail.
Laurent Ledoux ne veut plus de bureaux individuels, mais des bureaux en open-space fondés sur le principe du dynamic office. Autrement dit, lorsque vous arrivez le matin, vous vous installez où vous voulez.
Le président du ministère veut également quitter son bureau pour travailler au même endroit que ses salariés.
En surface, cela semble être une bonne idée puisque :
- cela renforce la cohésion sociale ;
- cela réduit les déplacements entre les bureaux et permet donc de gagner du temps.
En réalité, cette idée :
- empêche les employés de se livrer à une activité personnelle depuis leur poste de travail, par exemple prendre un rendez-vous chez un médecin ;
- instaure un contrôle social des employés par chacun d’entre eux.
Les syndicats n’ont pas été consultés pour la mise en place de ces réformes et y sont fortement opposés.
Un tel phénomène va dans le sens d’un mouvement qui dure depuis environ 30 ans : l’écrasement des syndicats par les dirigeants.
En effet, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe, les élites étaient terrifiées par les mouvements sociaux. Il était facile de provoquer une émeute. Ainsi, dès qu’une loi venait mettre le feu aux poudres, les dirigeants craignaient une nouvelle Révolution française.
Cependant, la constitution des syndicats et leur place toujours grandissante dans l’espace public ont généralisé les protestations et les ont rendues légales. Dès lors, la contestation a été intégrée à la structure de la société, lançant un processus d’assimilation de la frange radicale syndicaliste.
Une fois ce processus achevé, les élites ont détruit le pouvoir des syndicats, car elles n’avaient plus rien à craindre.
Effectivement, les classes dirigeantes n’ont pas peur de ceux qu’elles gouvernent et en profitent pour reprendre tous les droits durement acquis pendant les manifestations.
Somme toute, l’évolution des techniques de management provoque l’exploitation des employés par les structures de pouvoir. Qui plus est, le pouvoir des syndicats, dont les élites avaient autrefois peur, est maintenant réduit à peau de chagrin.
Le lean management a révolutionné les manières de travailler pour le meilleur et pour le pire
Le lean management repose sur l’idée d’une amélioration continue de l’entreprise, notamment en donnant une plus grande marge d’action aux employés. Cependant, aujourd’hui, les multinationales ont détourné le concept original de cette méthode. Par quoi ont-elles remplacé les valeurs du lean ?
Le lean management vient du Japon qui, après la Seconde Guerre mondiale, a vu son élite décimée et son industrie dans un état catastrophique.
Les entrepreneurs ont donc cherché :
- à motiver les travailleurs ;
- à repenser l’entreprise ;
- à revoir l’organisation du travail.
Ils ont donc mis en place le kaizen, qui se traduit par “amélioration continue”. Grâce à cela, le Japon est devenu, dès les années 1960, une puissance mondiale importante.
En 1947, les États-Unis, qui occupaient alors le Japon, y ont envoyé un observateur, William Edwards Deming.
Il est revenu dans son pays et y a importé le concept du kaizen sous la forme du lean management.
Ce concept repose sur :
- l’intelligence des employés ;
- le fait que chacun sait ce qu’il fait ;
- une simplification de la hiérarchie pour faire des économies et gagner en efficacité.
Les techniques du lean ont été utiles à la célèbre marque Harley-Davidson, qui était en difficulté à cause de l’arrivée des motos japonaises sur le marché dans les années 1970. L’entreprise présentait en effet 70 millions de dollars de dette.
En 1981, Rich Terrlink a été recruté en tant que directeur. Face à cette situation désastreuse, il a décidé de s’inspirer du lean pour remettre l’entreprise debout.
Dès lors, il a proposé à ses employés de s’exprimer pour repenser les comportements au sein de l’entreprise. Ceux-ci ont proposé de remettre en avant des valeurs d’intégrité très simples :****
- dire la vérité ;
- être juste ;
- tenir ses promesses ;
- respecter l’individu ;
- encourager la curiosité intellectuelle.
La confiance entre la direction et les employés est alors revenue, permettant à ces derniers de trouver de nouvelles idées.
En conséquence :
- les produits se sont améliorés ;
- les ventes se sont envolées ;
- les salaires et les retraites ont été augmentés.
Pourtant, aujourd’hui, les valeurs d’intégrité qui sont normalement au cœur même du lean ont été perverties par les multinationales.
Par exemple, ****au premier regard, vous pensez peut-être que des entreprises comme Google ou Facebook illustrent parfaitement le lean. Pourtant, ce n’est pas le cas, car :
- elles font appel à une hiérarchie de Bullshit jobs ;
- elles créent l’illusion de la satisfaction en proposant des bénéfices qui ne sont pas les véritables sources de bonheur des employés. Par exemple, des repas et des transports gratuits, des salles de massage et de yoga ou de très bons salaires.
Ces avantages ne garantissent aucunement le bonheur des salariés qui doit normalement être le moteur de la philosophie du lean. En effet, le bien-être s’obtient grâce au respect et à la considération.
Qui plus est, Facebook se donne des allures d’entreprise ouverte et innovante avec un fonctionnement horizontal. Cependant, elle est réellement contrôlée par une seule personne : Marc Zuckerberg.
Ces entreprises retournent donc à une hiérarchie en pyramide avec, au sommet, le “pacha-directeur” de la société.
En définitive, la culture du lean a permis à un bon nombre d’entreprises de se remettre sur pied. Cependant, certaines entreprises surfent aujourd’hui sur la vague de popularité de cette méthode pour opérer en secret un retour aux valeurs des entreprises traditionnelles.
Conclusion
Un bon salaire ne suffit pas pour être heureux au travail. Il faut donc remettre l’humain au centre de l’entreprise et valoriser les employés pour leurs idées et ce qu’ils sont. En tant que leader, vous êtes responsable du bien-être de ceux qui travaillent pour vous. Pour favoriser le bonheur de chacun, agissez donc en toute transparence, en mettant à plat les hiérarchies, en écoutant vos employés et en leur laissant prendre des décisions. Qu’attendez-vous pour appliquer ces conseils ?
Ce qu’il faut retenir de ce koob :
- avec l’ère numérique, l’organisation pyramidale n’a plus lieu d’être et nuit grandement aux performances des entreprises ;
- les Bullshit jobs sont des emplois tout à fait dispensables qui font perdre aux employés le sens de leur travail ;
- le lean management, lorsqu’il est correctement mis en place, met le bonheur et le respect des employés au centre de ses valeurs ;
- laissez vos collaborateurs décider et travailler sur des projets qui les intéressent vraiment pour qu’ils soient plus investis et productifs ;
- l’arrivée des entreprises libérées a permis aux dirigeants d’étouffer le pouvoir des syndicats ;
- les nouvelles multinationales ont détourné le lean management pour remettre l’intérêt des dirigeants au centre de l’entreprise.